Ses longs cheveux d’un noir profond refletaient
au fond de la baignoire d’émail
l’ondulation dûe à l’agitation de l’eau
donnait à sa crinière quelque chose d’envoutant.
Je restais là
à la regarder se noyer seule dans un fond d’eau de baignoire
d’une eau, par ailleurs, douteuse, stagnante, souillée
de la crasse éprouvée toute la journée, pénible journée passée.
Dans un sursaut qui me fit frémir
et sortir de ma létargie naissante
elle sortit la tête de l’eau, ses cheveux
par la même occasion se plaquant sur sa chair blanche
perdant toute leur magie, mais pas de leur charme.
« J’en peux plus de cette vie de merde. »
Je savais qu’elle allait me ressortir ce refrain-là.
Comme tous les jeudis soirs, ou les vendredis « très tôt »
elle avait des retours de soirée glauques, sombres
je n’ai pas le souvenir de l’avoir vu un jour sourire
sur la route du retour, de n’importe quel retour.
Le retour à la normal a ceci d’éprouvant, qu’il reste
le même à chaque fois. Je crois.
Je restais silencieux, elle savait que je ne dirais rien
assis sur le siège des toilettes à la regarder se sécher.
« L’intimité tu connais ? Sors maintenant. »
Discipliné moi ? C’est un euphémisme.
Je sortais, comme chaque fois, sans mot dire
sans l’ombre d’un sourire, d’un regard de sa part
j’avais parfois dans les mains le magazine féminin de la semaine
j’y plongeais avec un certain amusement les yeux
histoire de savoir un peu ce qui est « in » et « out »
dans la profession, ça peut servir.
Une petite demi-heure après l’éjection
c’était l’heure de l’éjaculation
systématique. Et puis venait le temps du repos
ses cheveux dans mon visage, je regardais son dos
passionnante courbe semblant ne trouver de fin
ni dans la nuque
ni dans le bassin
Elle s’emmerdait terriblement
elle ne savait pas partir
je ne savais pas la quitter
Je l’emmerdais terriblement.
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