Oui la solitude m’harrasse
oui je m’endors seul et frémissant de douleur
je saisis tout à ma portée pour le ramener à mon coeur
et l’étreindre comme un damné empoignant la vie qu’il a gâché.
Oui la hargne fait brûler mes yeux
et les larmes m’éteignent au profit du silence et de la meutrissure
oui il est en ma possession des outils de torture
qui savent si bien neutraliser mes douleurs
et de la plus creuse des ciselures que je taille
sur la chair blême c’est un sang noir sans saveur qui surgit.
Oui la course effreinée que je mène
ne se nomme autrement que l’errance
et les vagabonds sont sur mon chemin
derniers ramparts contre la folie
oui je peux encore sourire et m’émerveiller de la beauté du jour
oui je peux encore lever les yeux et cracher sur le destin
oui je peux encore serrer les poings et frapper l’univers entier
tant que la société des images peut encore m’aliéner de ses couleurs
je peux bien survivre et donner de mes réserves
je peux bien suspendre ma terminaison pour qu’on me dévore vif
et que sur place publique on entende les rires moqueurs
des grands prédicateurs et de ceux qui savent tout mieux que les autres.
On pourra encore longtemps insinuer que je cultive la charité chretienne
on pourra encore longtemps m’insulter de la sorte je ne dirai rien
je ne dirai plus rien qui puisse engendrer la lutte
puisque à ce jour d’avoir été si bien piétiné
je ne connais plus de l’existence que le goût âpre du béton et de l’écharde
Oui la fatigue et l’ennui sont les complices de mon assassin
oui leur étreinte m’est plus douce que la sacrée solitude
car c’est elle seule qui me prive de raisons d’être
et la solitude est un chemin trop long pour que je lui survive
buvant de ma chair les larmes et le sang, j’en mourrais tout de même de soif
de cette soif de vivre, de cette source dont on ne boit pas seul
de ce nectar résolument destiné à la perte
à l’heure où le besoin essentiel de dualité est tabou
à l’heure où chacun s’enterre mollement dans son propre trou
en attendant pieusement que la mort prenne la place du désir de vivre
Et oui je veux vivre plus que mille hommes
et oui je veux être attendu et désiré
et oui je veux appartenir à celle
qui par un courage extraordinaire
aura seulement la franchise de ses sentiments.
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