Un regard franc, d’une teinte indéfinie
en constante évolution
et puis cette moue d’insatisfait
en contradiction avec des rides
qui ne trompent pas
les rides du rire
d’une période heureuse sans nul doute révolue.
Il a cet air absent
et pourtant tout à fait là
ce mot d’une pertinence impeccable
le rendant mi-doux mi-dangereux
il semble qu’on puisse tout lui confier
tant il ne parait pas écouter
pour sitôt laisser tomber une sentence
terrible de vérité et de justesse.
En d’autres termes
il était un assassin
rien en lui ne laissait transparaître
la moindre émotion
et pour cela à présent on le payait.
Jean-Michel avait 23 ans
il était tueur à gage.
—
Jean-Michel au teint blême
n’aimait ni le soleil ni le jour
il vivotait de nuit en oiseau de proie
de bar en bar et de femme en femme
sans trop y croire
à simplement survivre
il traînait ses valises sous les yeux
et son vieux complet anthracite.
Tout le monde, la nuit le connaissait
au moins de vue sans pour autant
s’être un instant intéressé à qui
il pouvait bien être en fin de compte.
Cela arrangeait les deux partis
à chacun son boulot et ses loisirs
murmurait parfois Jean-Michel
au plus creux de son ivresse maladive.
—
Ce soir-là était pour lui un peu particulier
c’était son dernier contrat
pourtant cela ne le réjouissait pas
à croire qu’il connaissait bien
son habituel employeur pour qui
l’art de tuer est acquis à vie
ou plutôt devrait-on dire à mort.
Jean-Michel tenait fermement
dans la paume de sa main une grenade
prête à être dégoupillée
au moment où il entrait au 214, rue Saint Jean
restaurant bourgeois d’une ville sans nom.
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