J’avais rencontré cette nana durant une escapade nocturne
façon grand chelem d’un zinc à l’autre
sur les boulevards de la soif où nul ne se connaît
autrement que dans l’ivresse et la déraison.
Elle tranaît seule dans une taverne crasseuse
et je ne dénotais pas avec l’endroit.
On s’est tout de suite plu.
Il faut croire que la pénombre jouait en notre faveur.
J’avais eu un coeur à une époque
bien que j’en avais plus senti la présence depuis des lustres.
Ce sont ses regards tendres et ses caresses
qui ont remis en route la machine.
Les mois passaient que déjà je m’attachais à elle
comme un junky à son dealer
elle et moi, c’était viscéral
je sortis peu à peu de la déprime
elle retrouvait de son côté le sourire.
Il allait en falloir de la volonté
pour la laisser partir dix mois durant
de l’autre côté du globe.
A croire qu’elle n’était jamais bien chez elle.
J’y serais bien resté encore un peu pourtant
coincé entre le canapé en cuir et ses délicates cuisses
J’étais la fille à soldat
elle était le légionnaire en permission.
Quarante-huit heures sans une douche
gardant d’elle l’itinéraire de sa bouche sur ma peau
déposant sur elle et en elle les traces de mon affection
c’était notre façon de nous marquer au fer
de manière illusoire et temporairement indélébile
on s’aimait dans la chair autant que dans la tête.
Quarante-huit heures durant, sans sommeil
je rentrais à peine dans mon home sweet home
c’était ma façon de lui dire aurevoir
quarante-huit heures à refaire la cartographie du monde
sur les courbes de son corps subjectivement parfait.
Abandonnant toute perspective
d’émerger sereinement de cette aventure
j’envisageais de faire durer l’insomnie volontaire
en usant mes jeans sur les tabourets de comptoir
d’un bar-tabac où j’étais exposé depuis quelques mois.
M’était revenue cette habitude de perdre aux jeux de hasard
quand bien même la chance souriait
c’était pour mieux saisir l’occasion de remettre ça
tentant vainement de me familiariser avec la défaite.
Les heures passaient tandis qu’elle s’éloignait
j’avais la brume dans le regard et sûrement
de ses longs cheveux bruns dans ma gorge
de sorte que je préférais me taire et écrire ces lignes
en priant pour que son spectre se lasse de me hanter.
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