Danse avec Yumiko

Pour communiquer nous utilisons la langue anglaise.
Nous la maîtrisons, elle et moi, sensiblement aussi mal.
Elle présente la singularité d’être corporellement expressive.
Son rire est délicieux. Il semble sincère.

Nous nous sommes assis un moment face à la Champagne-Ardenne
que nous dominions depuis nos chaises longues.
Nous avons échangé quelques mots. C’était très doux.
Elle a fait les gestes nécessaires pour que je comprenne que je devais m’approcher davantage.
Alors j’ai gloussé comme une poule et j’ai croisé les bras.
Ensuite seulement je lui ai jeté un regard complice et puis c’est tout.
Depuis j’ai la certitude d’être seul. Jusqu’alors, j’en avais seulement le pressentiment.

C’est comme si nos corps issus des deux pôles opposés ne pouvaient se rencontrer.
Nous nous observons. Nos regards sont connectés.
Une force cependant s’oppose à la relation de nos frêles entités.
Nous sommes deux individus potentiellement magnétisés.

Ce jeu est à la fois violent et très doux.
Il est le centre de toutes mes préoccupations depuis notre rencontre.
Jusqu’à ce que le temps, ignorant bâtard, irrémédiablement nous sépare.

J’écris ton nom au revers d’une capsule de canette de bière
Le temps nous bouscule nous charrie nous enterre
Tu es partie ce matin en tâchant de rester digne
Vers des lendemains qui chantent tu nous as fait un signe

De tes mains jointives pressées contre ta bouche
se sont extirpés des souffles brûlants et des larmes furtives
Le monde est désormais un grand chaos ; je me mouche
J’erre dans la maison comme un radeau à la dérive.

Nous eûmes ces bons moments desquels il faudra tirer parti
lorsque nous remémorant de l’instant présent la vie semblera futile
tu t’en vas je ne sais où et je ne veux pas savoir pour qui
je reste, hébété, sur la route et sur les joues des larmes imbéciles.

Je voulais à tout prix que tu te souviennes de moi
toutes ces choses que j’ai fait ou dit ne servaient qu’à ça
tu m’as pris dans tes bras puis transmis une carte de visite
j’avais tellement besoin de toi, qu’adviendra t-il ensuite ?

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